Choses politiques

Écologie et cohérence

Les gens sont très sensibles à l’environnement. Ils ont lu beaucoup d’informations contradictoires sur le sujet, ils ont vu les films du commandant Cousteau et d’Al Gore, ils se laissent nonchalamment agresser par les démarcheurs Greenpeace dans la rue.

Ensuite, ils vous tiennent des théories fabuleuses: « Tu sais, c’est dingue ce que les gens consomment comme eau du robinet; il y en a même qui laisse couler pendant qu’ils se brossent les dents. Pendant qu’ils SE BROSSENT LES DENTS! »

Dingue.

Tibert à l’attaque des idées reçues (aucun rat n’a été blessé pendant la prise de vue)

Et puis au bout d’un moment, vous vous rendez compte que ces mêmes personnes qui vous tiennent des théories faramineuses sur la consommation d’eau, vous servent un sirop EN LAISSANT L’EAU COULER. C’est pour mieux la refroidir, disent-ils. Tu parles. C’est pour mieux gaspiller, mon enfant.

Mais si vous vous égarez à leur faire une remarque, alors là, ils le prennent très mal, et vous renvoie à VOTRE PROPRE consommation. « Ah ouais, je te vois venir avec ta mine d’écologiste en herbe; mais t’es venu en voiture, si je ne m’abuse? Et puis tes fringues, ils viennent de Taïwan en pétrolier, mon gars. Et puis pour ton sirop, il a bien fallu toute une industrie polluante derrière, alors j’hésite à te servir une eau tiède, pour t’apprendre à me faire des remarques désobligeantes. »

Et c’est là que l’argumentation est vicieuse: les consommateurs croient que les comportements écologiques impliquent une entrée en religion. Ils pensent qu’il faut faire tout, ou alors ne rien faire du tout. Mais c’est pas parce qu’on ne peut pas changer le monde en dix minutes qu’il ne faut rien faire dans cette direction. On peut appeler ça de l’idéalisme pragmatique.

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Pour revenir un peu sur Adolf H.

Un dialogue mythique que j’aime bien, lu dans « La part de l’Autre », d’Éric-Emmanuel Schmitt, Livre de Poche, dans toutes vos petites librairies. L’auteur fantasme sur le possible destin d’Adolf H., reçu à l’École des beaux-arts de Vienne, qui change totalement d’orientation morale. Après quelques années d’étude, la guerre de 14 éclate, et le peintre est mobilisé avec ses meilleurs amis, Neumann et Bernstein. Ils s’interrogent sur leur possible mort dans les tranchées:

p. 157
– S’il y a une justice, c’est moi qui dois mourir le premier… Ce ne serait pas une grande perte, dit Adolf.
– De toute façon, il n’y a pas de justice.
Neumann avait répondu d’un ton sourd, les dents serrées. Adolf le regarda avec soulagement.
– Tu as raison. Il n’y a pas de justice. Tout est loterie. La naissance, la mort, le talent. Et c’est tant pis pour nous.

“La part de l’autre”, Éric-Emmanuel Schmitt, chez Livre de Poche en 2001

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Choses politiques

Pénis, Hitler, Oxymore

La légende circule que tel billet de blog qui contiendrait des mots-clés très recherchés sur Internet pourrait attirer à lui un pourcentage important des recherches effectuées sur Google. Beaucoup de blogueurs s’en servent en rédigeant un ou deux billets-prétextes qui contiennent un dizaine de mots cochons, pour ainsi faire exploser leurs statistiques.

Comme par exemple: bite, couille, nichons, suce-moi royalement, petite brunette en train de se faire défoncer la chatte, éjaculation faciale sur les lèvres purpurines de la duchesse en manteau de soie.

Le procédé est plutôt séduisant. Mais je ne comprends pas pourquoi la majorité des blogueurs se limitent à rameuter les internautes en quête de détails croustillants. On pourrait tout aussi bien vouloir attirer les intellectuels spécialistes en littérature française avec: Baudelaire, Mallarmé, Proust, métaphore, oxymore, anacoluthe, antanaclase, litote, euphémisme, alexandrins…

Dans le même ordre idée, on pourrait vouloir ameuter les écologistes et défenseurs des énergies « vertes » avec : protection, ozone, environnement, écologie, développement durable, 4×4, Nicolas Hulot…

Ou alors les extrêmistes de droite: Hitler, combat 18, nazi, néo-skin, IIIe Reich…

Ce qui peut être très intéressant, c’est d’attirer deux publics différents en même temps; par exemple, si l’on souhaite s’attirer les faveurs des obsédés sexuels et des spécialistes de littérature, on obtient quelque chose comme: Proust, « prout », aubépines en fleurs, pine dans le cul, Apollinaire, douze milles verges, métaphore, méga-bite bien profond dans ton cul.

En somme, ce genre de billet témoignerait d’une manière de penser révolutionnaire: jusqu’ici, les obsédés sexuels se limitent aux sites pornographiques, tandis que les philatélistes ont « timbre.com » dans leurs favoris. Mais en provoquant la rencontre d’individus aux intérêts différents, l’Internet tiendrait enfin sa promesse de rencontre culturelle, de média global et partagé.

De fait, le futur appartient aux intellectuels qui pourront parler de double-pénétration (et de hardeurs qui pourront disserter sur Proust).

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