Ce week-end, j’étais tout absorbé dans mes soirées de fanfare. Sur deux soirs, on prépare des repas pour deux cents personnes, et j’ai participé à la préparation de cuisine. En compagnie de quelques autres fanfarons, j’écalais les oeufs (on peut dire peler les oeufs, mais c’est vachement moins frime; tandis que écaler, c’est le vrai mot: on peut dire écalage, écalons, ou alors que j’écalasse).
Mais je ne veux pas parler de linguistique, bordel.
À côté de moi, il y avait un petit gugusse qui me disait qu’il avait une technique du tonnerre pour écaler les oeufs: il en cassait plusieurs, et il arrivait à distinguer ceux qui étaient « faciles » à écaler, et ceux qui l’étaient moins. Du coup, il n’écalait que les oeufs « faciles », tandis que les écaleurs amateurs comme moi, on se tapait les oeufs dont la coquille s’accroche au blanc, si bien que vous pelez non solum la coquille sed etiam les couches de blanc qui viennent avec. Pour un oeuf de bonne taille, vous en arrivez à une couille jaune d’une taille insignifiante qui va faire franchement ridicule dans la salade. Bon.
Alors moi je lui dis, ouais mais hé, si tu écales seulement les oeufs qui vont bien, tu vas plus vite, d’accord-okay, mais tu vas quand même devoir écaler les oeufs qui sont difficiles à la fin. Et là, l’illumination: j’avais touché à la sagesse universelle. Les gens préfèrent les petits plaisirs immédiats aux grands labeurs, promesses de réconfort. Enthousiasmé, je lui dis, ouais, alors si tu écales d’abord les faciles, tu vas finir par les difficiles et tu vas rester sur un méchant souvenir; tu vois, mec, tu devrais commencer par les problèmes difficiles et tu aurais la satisfaction d’avoir des récompenses facile après.
Les autres m’ont dit de fermer ma gueule de philosophe au rabais, vu qu’on avait encore une bonne centaine d’oeufs à écaler et que j’avais intérêt à me grouiller.
Je m’en fous, j’aime bien ma théorie à la con.
… En fait je viens de passer 1/2 heure à t’écrire un joli petit commentaire sur la recette de l’oeuf dur aux poivrons de Nouvelle-Zélande sur lit de roesti à la truffe blanche nappé d’un fin coulis de côte de bette façon meunière, mais ce con d’Explorer a bien sûr planté…
Du coup, je préfère le plaisir simple et immédiat d’une petite partie de « 4-Seconds Firestorm » à une nouvelle stimulation intense de la petite bande de synapse qui me reste encore sous mon grand chapeau… Et ouais, je sais que c’est choisir la facilité, mais des oeufs j’en ai aussi pelé cet après-midi-là, et sans distinction de leur taux d’écalabilité!
Bon je voulais faire la maline et te trouver une petite citation au poil pour ton article, mais j’ai beau chercher, je trouve pas ce que je veux… Je vais y réfléchir (aïe, ça mousse!!), comme ça ça me donnera une bonne raison pur te récrire…
Yen a quand même une qui s’impose, surtout à toi…
« La barbe ne fait pas le philosophe » Plutarque
Bon toi t’étais déjà philosophe avant d’être barbu, alors ça compte pas vraiment…;o}