Donc je résume pour ceux du fond: en juillet 2008, Hannibal Kadhafi (le fils de l’autre) est arrêté par la police de Genève, celui-ci étant accusé de mauvais traitement sur ses domestiques; peu après, les relations diplomatiques Libye-Suisse s’enveniment, au point de réduire les échanges économiques de 70%. Une année après, (mi-août 09), le président de la Confédération Merz s’excuse auprès du dictateur Mouammar Kadhafi pour que le commerce reprenne pour que 2 ressortissants suisses retenus arbitrairement en otage puissent rentrer en avion. L’opinion publique s’émeut de ces excuses, crie qu’on-ne-baisse-pas-son-froc-devant-un-dictateur et que Merz est une poule mouillée qui devrait démissionner.
Hans-Rudolf, je suis de tout cœur avec toi.
Tout d’abord, le peuple a souvent des vues à court terme (ça, c’est un euphémisme), et si on veut embrasser toute la complexité du problème de la Confédération, il faut savoir que la Libye est un important fournisseur de pétrole pour notre chère Helvétie, et qu’on l’aurait eu dans l’os, avec le prix du baril qui flambe (ça, c’est une métaphore). Du coup, les gens qui ne prennent pas en compte ce majestueux porte-à-faux croient que la Suisse peut jouer les premières de classe en diplomatie et pourrait librement envoyer paître un ex-officier à lunettes. Le problème, c’est que c’est un-peu-de-pétrole contre des-excuses-à-genoux, mes chers confédérés.
Hans-Rudolf, tu aurais donc dû proposer ça au peuple suisse: okay, on va jusqu’au bout de notre éthique, on fait un beau doigt d’honneur à Mouammar, mais alors on renonce au pétrole pendant un mois. Ben oui, facile: trente jours durant, on ne touche pas la pompe et on va à pied au boulot. Voilà qui serait un modèle de citoyenneté, de montrer au monde qu’on s’en branle d’un pseudo-embargo sur l’essence: ton or noir corrompu ne me salira pas les mains, sale dictature fasciste.
Tant qu’on accordera plus d’importance à notre auto qu’à notre éthique, les lunettes noires continueront de nous entuber (alors ça, c’est une métonymie et une métaphore en même temps).